Alabama Monroe
« Le chagrin des Belges » est le titre d’un roman initiatique de l’écrivain flamand Hugo Claus publié dans les années 80. Son titre pourrait illustrer à merveille les quelques remarquables mais désespérantes oeuvres cinématographiques belges que j’ai vues un peu par hasard ces dernières semaines.
Tout d’abord, deux films d’un réalisateur extrêmement doué (et extrêmement désespéré) Felix Van Groeningen.
Alabama Monroe : le film qui a reçu le César du meilleur film étranger en 2014 raconte l’histoire de Didier et Elise : il est chanteur de country dans les bars de province, elle est tatoueuse. De leur relation fusionnelle va naître une petite fille Maybelle qui tombera très vite gravement malade… Le petit monde marginal d’Alabama Monroe est attachant mais l’atmosphère générale et les couleurs sombres annoncent le malheur comme la nuée l’orage.
Belgica : Jo et Frank sont frères. Le premier, borgne, est célibataire et entreprenant, le second, bel homme, est père de famille et faible. Ils décident de gérer ensemble un bar à la mode « Le Belgica ». Mais après un succès foudroyant, l’établissement va connaître, surtout à cause des inconséquences de Jo, incidents et difficultés qui vont mettre à mal les relations entre les deux frères. Cette fresque de 127 minutes est un véritable chef d’œuvre, une sorte de « A l’Est d’Eden » d’outre Quiévrain . Bouleversant mais pas franchement désopilant.
Au delà de ces deux films on peut également parler de la saison 1 d’une série produite par la chaîne TV belge « La Une ». Il s’agit de La trêve un polar provincial et poisseux réalisé par Stéphane Bergmans. Dans une petite ville des Ardennes, un jeune footballeur africain est assassiné. L’enquête de Peeters, un inspecteur bien cabossé par la vie, va révéler, un peu à la manière de l’inoubliable Twin peaks, tout un tas de misérables secrets et de turpitudes avérées dans une ville apparemment sans histoire. On ne sort pas indemne de cette enquête (quête ?) qui a pour décors des paysages magnifiques mais d’une froideur absolue. Peut-être la série du moment (meilleure série francophone en 2016).
Nous sommes loin d’Annie Cordy, des baraques à frites et des moules de Léon, mais ces œuvres sont belles comme des tragédies antiques. La Belgique, avec sa complexité et ses contradictions comme métaphore d’un monde qui ne va pas très bien, pourquoi pas ?
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