L’expansion militaire chinoise

La publication du rapport annuel du département de la Défense des États-Unis selon laquelle la Chine a été accusée d’expansion militaire a suscité la vive colère des autorités chinoises.   Selon un rapport du Pentagone, la Chine envisage de créer des bases militaires au Pakistan et en mer du Sud. La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hua Chunying a qualifié de mensonge ce rapport avant de rejeter catégoriquement de tels sujets. « La Chine établit des relations très amicales avec d’autres pays et toute spéculation en cette matière est superflue », a-t-elle ajouté. La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a souhaité que les États-Unis laissent de côté la pensée de la Guerre froide et adoptent une approche logique vis-à-vis de l’expansion militaire de la Chine. Selon le rapport du Pentagone, la Chine aurait dépensé 180 milliards de dollars l’an dernier pour son armée. Ce chiffre serait supérieur à celui communiqué par Pékin, qui serait de 140 milliards de dollars. Des responsables américains estiment que la Chine a l’intention de mettre sur pied des bases militaires dans d’autres pays pour ainsi raffermir sa puissance militaire. « La Chine n’aura aucun programme pour une expansion militaire et ne suit aucun plan pour renforcer une influence militaire », insiste le ministère chinois de la Défense dans un communiqué émis en réaction au rapport annuel du Pentagone.

Danser à Bangalore

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« Neck of the Woods », de Parth Bhardwaj
© Richa Bhavanam

À Bangalore, Attakkalari, une association indienne, qui depuis plus de vingt ans œuvre pour la formation de danseurs contemporains, crée en 2001 la première biennale de danse contemporaine en Inde afin de présenter des travaux chorégraphiques d’envergure internationale et de créer un tremplin pour les jeunes chorégraphes émergents. L’association est co-productrice de toutes les créations en mettant ses locaux et son personnel technique et administratif à disposition des résidents. Le festival est également soutenu par de nombreuses organisations culturelles telles que le ministère de la culture indien, le département du tourisme du Karnataka, l’ambassade de Norvège, l’institut Goethe, la fondation Pro Helvetia, l’Institut français en Inde et de nombreux autres partenaires.

Cette huitième édition est la plus importante depuis la création de l’évènement. Son slogan « Bangalore Moves » traduit l’ambition de susciter un engouement pour la danse contemporaine et son développement au-delà des réseaux actuels. Sur la scène principale sont attendus la compagnie française CCN2 de Rachid Ouramdane, la compagnie canadienne Marie Chouinard ou encore les Espagnols de la compagnie Guy Nader-Maria Campos. Dans cet environnement multiculturel, les chorégraphes sud-asiatiques du programme « Platform – emerging South Asia » bénéficient d’un auditoire de programmateurs internationaux. Enfin, FACETS, le programme de résidence, offre un espace de création privilégié à de jeunes chorégraphes dont le manque de moyens et d’espaces adéquats restreint souvent les possibilités de création.

Un mois avant le début du festival, les sept danseurs-chorégraphes en résidence rejoignent les studios d’Attakkalari pour travailler à la création d’une nouvelle pièce d’une dizaine de minutes. Ils sont pour la plupart indiens, originaires de Bombay, Delhi et Bangalore. L’un est originaire de Dakha au Bangladesh. Faute de moyens, il est le seul représentant d’Asie du Sud hors Inde sélectionné par le jury de FACETS. Enfin, deux chorégraphes internationaux sont présents, grâce au soutien d’organisations culturelles de leurs pays respectifs : InKo Centre et Arts Council Korea pour la Corée du Sud et Dancebase Edinburgh au Royaume-Uni.

Tahnun, le résident bangladeshi, est, dès le premier jour, impressionné par la taille du studio principal. Il s’estime chanceux et prend cette opportunité très au sérieux : « nous n’avons pas d’infrastructures semblables au Bangladesh ». À Dakha, il vit principalement des « corporate shows », des soirées d’entreprises. Pour pouvoir vivre de son métier de danseur, il pratique divers styles et techniques. Formé initialement au kathak — danse traditionnelle du nord de l’Inde — à Calcutta, il a également des notions de danse classique, contemporaine et claquettes qui l’aident à répondre aux attentes de ses clients. Malgré les difficultés et le peu de goût des Bangladeshi pour la danse contemporaine, Tahnun dit vouloir ouvrir la voie pour une scène qui parlerait de l’identité des habitants du Bangladesh et que ceux-ci pourraient comprendre.

Surabhi, elle, vit à Bangalore. Après un début de carrière comme ingénieur informatique chez Google, elle démissionne en 2013 pour entamer une formation à Attakkalari puis se lancer dans une carrière de danseuse professionnelle. « J’ai toujours fait de la danse comme loisir : danse moderne, danse Bollywood… Un jour j’ai découvert la danse contemporaine et je me suis sentie en adéquation parce que ça me permettait de lier l’intellectuel au mouvement ».

Meghna a grandi à Delhi où elle s’est formée à la danse classique et contemporaine. Durant sa scolarité, elle a bénéficié d’une bourse pour participer à un programme d’échange de trois mois au centre Marameo de Berlin. Sur les réseaux sociaux, elle fait part de sa joie de danser de nouveau pendant un mois. « À Delhi, la location de studios coûte très cher, donc c’est compliqué de trouver des lieux pour répéter ».

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Performance de Kathakali à Mudra
© Aurélia Chalono

Il y a des absents. Au Pakistan, la danse considérée comme obscène est interdite depuis 1981 par la clause numéro 7 du « NOC » — No objection certificate (1) —, texte issu du Dramatic performances act (2) de 1876… Même en Inde où les arts se développent dans les villes, la liberté du corps, notamment pour les femmes, reste bien souvent un tabou. La création d’un espace qui soutienne la liberté du corps en Asie du Sud est donc loin d’être un acte neutre tant il constitue une opportunité pour faire entendre des voix dissonantes face à l’oppression des corps — mais aussi face à une certaine prédominance occidentale sur les scènes internationales.

La spécificité de FACETS ne tient pas uniquement aux parcours de ses résidents mais aussi à la présence de « mentors » internationaux, des professionnels reconnus dont la mission est d’épauler les jeunes chorégraphes dans leur processus créatif. Cette année, à l’exception d’un designer son indien et d’un chorégraphe sud-coréen, aucun des mentors n’est originaire d’un pays sud asiatique. Ils viennent de Suisse (un designer son et deux designers lumière), d’Espagne (un dramaturge associé à Fabbrica Europa en Italie), du Portugal (une chorégraphe). L’influence culturelle européenne se manifeste ici de manière concrète.

De fait, les compagnies invitées ne pourraient pas financer leurs séjours sans le soutien des réseaux culturels diplomatiques de leurs pays de production. L’organisatrice du festival, Ruhi Jujunwallah, tient à développer un festival international qui ne soit pas « blanc » : « pour faire venir la compagnie sud-africaine, nous avons dû nous y prendre près de deux ans à l’avance afin qu’ils aient le temps de faire les demandes de subventions nécessaires ». Les moyens et l’implantation des organismes de diplomatie culturelle de certains pays influencent ainsi profondément les choix de programmation. À Bangalore, tout au long de l’année, le calendrier de la création contemporaine est majoritairement rythmé par les organismes suisse, allemand et français, dont l’apport financier est essentiel au développement des arts non traditionnels. Malgré la diversité de leurs approches, axées soit sur les collaborations entre des artistes de leurs pays et des artistes indiens, soit sur la simple diffusion d’artistes de leurs pays, ces organisations propagent, parfois malgré elles, l’idée d’une supériorité culturelle européenne.

Il est vrai que le manque de moyens de création et de diffusion des artistes sud-asiatiques fait obstacle au développement de la scène locale. En Inde par exemple, l’accent est mis avant tout sur les arts traditionnels. La danse contemporaine y est encore jeune alors qu’elle est quasi inexistante dans d’autres pays de la région. Ainsi, l’admiration des artistes sud-asiatiques pour les scènes contemporaines européennes les conduit parfois à une certaine schizophrénie — puiser dans leur héritage leur paraît toujours plus difficile qu’aux Européens. Pourtant, pour l’Inde par exemple, yoga, bharatanatyam (danse du sud de l’Inde), kathak, kathakali (tradition de danse-théâtre du sud de l’Inde), kalarippayatt (art martial méconnu du sud de l’Inde), chhau (forme de danse semi-classique) offrent un riche répertoire de formes. Mais s’en nourrir pour les réinterpréter, par delà le fanatisme religieux, les traumatismes coloniaux et une certaine routine, demeure ardu. L’apport de traditions asiatiques telles que le yoga, le taï-chi ou encore le qi gong a participé à l’évolution de l’approche du corps, du temps et de l’espace en danse contemporaine. Elle demeure pourtant une discipline largement issue de la tradition occidentale des pays où la plupart des chorégraphes qui s’en revendiquent ont vécu et se sont produits.

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« Queen Size », de Mandeep Raikhy
© Sandbox Collective

Tandis que les chorégraphes contemporains occidentaux se contentent en général d’exprimer leur imaginaire en mouvement, sans souci de définir a priori leurs influences, certains chorégraphes indiens se trouvent parfois confrontés à la nécessité de désapprendre. Par exemple, le bharatanatyam nécessite un entrainement extrêmement varié et sophistiqué — jeux de pieds, de regard, travail pointu des rythmes, mimiques faciales — dont l’apprentissage est un enrichissement pour la connaissance du mouvement, mais qui nécessite encore de trouver comment le faire jouer dans une conception contemporaine. L’enjeu, c’est l’intégration d’une jeune scène de danse contemporaine indienne à une scène internationale préexistante et dominée par des standards européens.

De nombreux artistes indiens qui se revendiquent de la scène contemporaine ne sont pourtant pas essentiellement préoccupés par la recherche d’un héritage traditionnel. « Je me considère comme faisant partie d’une génération sans nationalité, témoigne ainsi Meghna. Du fait de l’Internet, j’ai le sentiment d’appartenir à de nombreuses cultures, choix, identités et nations ». À l’opposition entre Est et Ouest, elle préfère opposer « humain et nature, violence et non violence et même humain et non-humain ». Meghna illustre ainsi les multiples identités et clivages qui traversent l’Inde, de modes de vie traditionnels à l’émergence d’une génération que l’on pourrait qualifier de postmoderne.

Cependant, l’espoir de rencontrer, en oubliant son héritage propre, les critères esthétiques internationaux définis par l’Occident conduit souvent, sinon à la perpétuation d’un imaginaire de domination européen, du moins à une certaine monotonie dans la création. Le développement d’une scène de danse contemporaine pourrait toutefois, avec le temps, donner lieu à des travaux de plus en plus intéressants. Dans le cadre du programme Platform de la biennale, le chorégraphe Mandeep Raikhy présentait « Queen Size », mettant en scène deux hommes dans des positions explicites sur un charpoy — lit traditionnel de la région du Kerala — devant un public restreint d’une vingtaine de personnes qui les entourait et se trouvait ainsi dans l’impossibilité de détourner le regard ou de quitter la salle. Cette chorégraphie faisait référence à ce qui est communément appelé la section 377, un article qui criminalise l’homosexualité en Inde. Puisant dans un imaginaire indien mais au travers de mouvements et d’une approche critique résolument contemporains, le chorégraphe parvenait ainsi à impliquer le spectateur pour le questionner sur son rapport à l’homosexualité. Un bon exemple de cette volonté de décolonisation de l’imaginaire qui est la marque de la biennale de Bangalore.

Bibliographie

Danses et identités. De Bombay à Tokyo, éditions du CND, 2009

Tilt Pause Shift : Dance ecologies in India, 2016

Time and space in asian context : contemporary dance in Asia, 2005

Intercultural Contemporary Dance in Malaysia. Challenging hegemony and presenting alternative national identities through contemporary dance, Joseph Gonzales, 2010

Labels, Histories, Politics : Indian/South Asian Dance on the Global Stage, in Dance Research, Edinburgh University Press, 2008

L’université et le bâillon

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« If I could speak I’d sing… »
Lake Crimson

Le secrétariat d’État à l’enseignement supérieur et à la recherche a publié le 9 mai 2017 une circulaire fixant pour règle aux universités d’accorder la protection fonctionnelle aux enseignants-chercheurs attaqués en justice pour diffamation. Le 9 mai, soit le lendemain de l’élection d’un nouveau président et à la veille d’un changement de gouvernement. De quoi se rassurer un peu sur la capacité d’un gouvernement à agir jusqu’au bout. Ce contexte de publication ne facilitera pas la publicité d’une mesure, que l’on pourra trouver très secondaire. S’agissant d’un texte visant à protéger les scientifiques contre les poursuites bâillons, un élément d’efficacité suppose pourtant de le faire connaître. Il faut en parler. Les aléas de la vie ont fait qu’ici même nous avons alerté sur le danger des poursuites bâillons, ces actions en justice dont la pertinence tient moins à la validité des raisons légales explicites d’un plaignant qu’à sa volonté d’intimider un adversaire en l’amenant devant un tribunal.

Lire aussi Anne-Cécile Robert, « L’État de droit, une notion faussement neutre », Le Monde diplomatique, mai 2017.Le procédé est dérangeant tant il prend cyniquement en défaut le principe formel d’égalité devant la justice, pourtant inscrit au fronton des tribunaux : le contentieux n’étant pas gratuit, les riches puissances privées, individuelles ou collectives, bénéficient d’un avantage structurel sur les plus modestes. Certes il est toujours loisible à ces derniers de se taire. Mais s’avisent-ils du contraire, ne serait-ce que par vocation professionnelle — celle des scientifiques —, qu’ils risquent de se heurter à des intérêts matériels. On a ainsi vu se développer depuis quelques décennies les poursuites bâillons, terme français — ou plutôt canadien — pour désigner les SLAPP (Strategic Lawsuit Against Public Participation (1) ), ces procédures plus fréquentes outre-Atlantique mais dont la menace s’étend.

Quand je fus attaqué en justice pour diffamation par M. Patrick Buisson, qui me réclamait la bagatelle de 160 000 euros, je ne connaissais même pas l’expression de poursuite bâillon et encore moins celle de SLAPP. Mes collègues juristes non plus qui me donnèrent alors l’adresse d’un « bon avocat ». Un ami du Monde diplomatique m’informa. En mettant le mot sur la situation, je me sentis moins seul. Un autre ami, président de tribunal administratif, m’indiqua l’existence de la procédure de protection fonctionnelle : elle n’était pas faite pour ces circonstances mais dans le cas où la responsabilité civile d’un agent de l’administration était engagée. Il estima qu’il y avait une chance sur deux pour qu’elle soit acceptée par l’université. Il fallait tenter. Je venais juste d’obtenir gain de cause en première instance — mais la poursuite bâillon ne serait pas cohérente si, en cas d’échec, le plaignant ne persistait pas. Avant le jugement en appel, ma demande fut acceptée par l’université. Je crois que ce fut la première fois que la protection fonctionnelle s’appliquait à la liberté d’expression. Une autre plainte en diffamation étant déposée contre moi par une société de conseil fiscal et son propriétaire — avant même le verdict en appel de la première affaire —, je réitérai une demande de protection fonctionnelle, qui fut refusée. Mon avocat évoquait toutefois une poursuite bâillon dans sa plaidoirie et le jugement ratifia l’expression. Pour la première fois, je crois.

Les dommages et intérêts accordés ne furent pas confirmés en appel et j’en étais donc pour mes frais. Il me semble que l’enregistrement judiciaire de l’expression de poursuite bâillon n’était pas négligeable même si je sais qu’il est facile de se moquer de ces victoires symboliques. D’autant plus qu’un article de la Revue des droits de l’homme prit partie pour une meilleur protection de la liberté d’expression des scientifiques (2). En juin 2016, j’eus l’occasion de présenter cette cause aux conseillers du nouveau secrétaire d’État Thierry Mandon (3). Celui-ci créa une commission d’enquête dont le travail a eu le mérite de préciser les risques et de s’engager en faveur d’une protection systématique des universitaires (4). La circulaire du 9 mai en est le premier résultat, même si la commission n’omet pas d’en signaler les limites (ne serait-ce que parce qu’elle ne protège qu’une catégorie de citoyens). Les bonnes nouvelles pour la liberté d’expression ne sont pas si nombreuses.

Pour saisir la portée de cette protection, il ne faut pas seulement considérer la partie visible de l’iceberg. Ici, faire la publicité de cette protection nouvelle peut suffire à prévenir des poursuites. Sachant que les universitaires sont désormais systématiquement protégés pour les interventions publiques dans le cadre de leur compétence, des puissances devraient renoncer à s’attaquer aux universités et non à un individu isolé. La rareté relative de ces poursuites peut encore susciter les sarcasmes de tous ceux qui, en pareille occasion, objectent toujours que l’on fait beaucoup de bruit pour rien. Pour ceux-là, on le sait, il y a toujours plus urgent ou beaucoup plus grave. Et encore de suggérer que c’est un encouragement à l’irresponsabilité. Or non seulement cette protection n’est pas inconditionnelle, au sens où elle ne vaut pas en cas de faute professionnelle, mais elle ne supprime pas les coûts moraux des poursuites pour ceux qui les subissent.

La commission a donc pointé les limites d’une telle mesure, limitée aux universitaires, mais il ne lui revenait pas de s’attaquer à cette étrange procédure par laquelle le plaignant peut déposer une plainte avec constitution de partie civile, impliquant une mise en examen automatique. Le versement d’une caution modeste ne saurait dissuader l’initiateur d’une poursuite bâillon qui l’entame justement parce qu’il est sûr de ses moyens financiers. Sans doute se console-t-on d’être mis en examen. Encore que dans les affaires politiques qui se succèdent (lire « De la vertu en politique »), on entend souvent des politiciens faire valoir qu’ils n’ont pas été mis en examen, comme si cela était une preuve d’innocence… Sachant qu’on peut l’être pour une accusation de diffamation, on appréciera la différence. Un candidat à la présidence de la République (François Fillon) a même pu utiliser l’argument de la (fausse) symétrie en faisant valoir, à une romancière (Christine Angot) qui évoquait sa mise en examen pour emplois fictifs, sa propre mise en examen pour diffamation. Les juges d’instruction n’aiment pas appliquer automatiquement cette mise en examen qu’ils signifient dans leur bureau à des journalistes ou universitaires qui n’ont rien à dire, sinon à acquiescer à leur état-civil. La procédure perdure cependant.

L’objection de la rareté (de telles procédures) tient d’autant moins qu’il est de bonnes raisons de craindre une amplification des poursuites bâillons étant donné l’agressivité de puissances privées et le régime d’opinion dans lequel nous vivons (et auquel ce blog se consacre). Les plaintes pour diffamation déposées en France contre Greenpeace par la société Socfin, exploitant forestier en Afrique ou par Résolu au Canada — qui réclame pas moins de 200 millions d’euros à Greenpeace Canada —, ne sont que des cas récents. D’autres secteurs économiques se distinguent par une certaine brutalité des actions judiciaires. Sans scrupule et au nom des milliards que les rapports critiques des scientifiques leur feraient perdre. « Das ist doux commerce », se moquaient déjà Marx et Engels devant les massacres coloniaux, ironisant sur la théorie du doux commerce de Montesquieu.

Lire aussi Pierre Bourdieu, « Pour un savoir engagé », Le Monde diplomatique, février 2002.Certes, on peut se féliciter que dans le monde moderne, des procédés plus expéditifs d’élimination de la critique aient été abandonnés. Enfin, pas dans tous les pays… Évidemment l’écart croissant des richesses ne favorise pas la civilisation des conflits. On peut craindre au contraire que les possibilités d’enrichissement rapide n’encouragent davantage à l’avenir la brutalité et la morgue. Les meilleures résolutions de la justice et des États resteront peu dissuasives tant que les règles cyniques du capitalisme prédateur — on peut gagner énormément, même en perdant sur le terrain judiciaire et en dépensant des frais d’avocats — resteront en vigueur. À quand un nouvel ordre moral bâti sur une subtile gestion financière des contentieux ?

Serait-ce trop attendre de la recherche universitaire qu’elle s’engage d’ores et déjà dans des voies plus combatives ou plus délicates quand tant d’objets d’étude sont négligés — trop sensibles ? — ou quand tant d’analyses pèchent par excès de prudence ? Il y a encore moins d’excuses aujourd’hui.

Le Sénat sur la piste des Terminator

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Terminator Exhibition : Hydrobot
cc Dick Thomas Johnson

Lire aussi Philippe Hugon, « Le Sahel entre deux feux djihadistes », Le Monde diplomatique, mars 2016.Ces engins sans pilotes embarqués, dits « de moyenne altitude, longue endurance » (MALE), sont des drones Reaper fabriqués par General Atomics, déployés en observation et recueil de renseignement, notamment sur le théâtre sahélien. Leur utilisation a été bridée, durant plusieurs années, par le fournisseur américain, qui exigeait la présence de ses agents sur site, pour les phases de décollage et atterrissage. La France se retrouvait ainsi dépendante des États-Unis à la fois pour la mise en œuvre du vecteur, l’architecture des systèmes, la maintenance de l’engin, la formation des personnels, etc.

Pour les sénateurs (1), l’armement de ces drones — qui n’avait pas été envisagé jusqu’ici — ne serait pas une révolution, mais constituerait un progrès majeur. Ils développent une série d’arguments en ce sens :

outre les États-Unis et Israël, leaders du secteur, de nombreux pays en disposent déjà, et les utilisent régulièrement, notamment au Proche-Orient ;

en Europe, le Royaume-Uni aligne 10 drones Reaper armés ; l’Italie a obtenu à la fin de 2015 l’autorisation américaine d’armer ses 6 Reaper ; et l’Allemagne a annoncé la location à partir de 2018 de 3 à 5 drones Héron TP israéliens armés (2) ;

hors d’Europe, de nombreux États utiliseraient également des drones armés : Pakistan, Irak, Iran, Nigeria, Arabie Saoudite, Émirats arabes unis, Égypte, Turquie…

par ailleurs, les drones MALE des forces françaises sont déjà présents dans la boucle des missions de frappe aérienne, car les pilotes et opérateurs de drones « illuminent » les cibles des missiles Hellfire des hélicoptères et des bombes laser des Mirages 2000 D ;

l’armement des drones améliorerait l’efficacité des forces et soulagerait l’aviation, car « l’endurance exceptionnelle du drone MALE lui permet, dans la profondeur d’un théâtre d’opérations, d’attendre le dévoilement des cibles dissimulées et d’observer longuement leur environnement » ;

l’emport de missiles ou de bombes guidées permettrait ainsi de « réduire la boucle » entre le repérage et la neutralisation, économisant la durée nécessaire à l’arrivée de l’avion ou de l’hélicoptère (durée qui peut être très significative sur un théâtre aussi immense que la bande sahélo-saharienne).

l’efficacité et la précision du traitement de la cible pourraient être optimisées : « Un drone armé pourrait par exemple « traiter » une cache d’armes au moment où des combattants y accèdent (alors que ceux-ci auraient probablement le temps, s’il fallait attendre l’arrivée d’un avion, de se disperser ou de se déplacer vers une zone densément habitée, rendant toute frappe impossible) » ;

la frappe aérienne via le drone permettrait « sans conteste » de diminuer de manière très importante le risque de dommages collatéraux, le pilote du drone ayant une idée très claire et directe de l’état du terrain sur lequel il va déclencher son tir ;

la présence de drones armés en soutien permanent des forces au sol permettrait de les dégager plus rapidement d’une embuscade : le drame de l’embuscade d’Uzbin (3) n’aurait peut-être pas eu lieu si un drone avait appuyé et renseigné les forces au sol. Retour d’une mission d’information à Niamey, le sénateur Cédric Perrin, co-président du groupe de travail qui a accouché de ce rapport, assure avoir « senti l’angoisse des équipages des drones à l’idée qu’ils puissent, faute d’armement, être de simples spectateurs au-dessus d’un théâtre où leurs collègues seraient pris à partie ».

en dehors de ces cas de frappes « d’opportunité », les drones armés peuvent également être employés pour « surveiller et suivre dans la durée une cible de haute valeur sur un théâtre d’opérations, puis la neutraliser quand les conditions sont réunies » ;

enfin, il s’agirait de soulager une aviation de combat et des ravitailleurs déjà employés au maximum de leurs capacités. Les « cibles d’opportunité » ou celles n’exigeant qu’une puissance de feu réduite pourraient ainsi être « avantageusement “traitées” par des drones ».

Guerre sans risque

Lire aussi Grégoire Chamayou, « Drone et kamikaze, jeu de miroirs », Le Monde diplomatique, avril 2013.Les auteurs du rapport sont conscients des réticences manifestées en France sur cette question de l’armement des drones — ces « engins volants sans humains » (UAV), pour reprendre la terminologie américaine. Ils font valoir que la France ne possède que quelques drones MALE (une douzaine à terme) — un faible nombre qui interdit de facto d’opter pour la politique d’utilisation massive des drones armés. Ou encore que l’armée de l’air pilote les drones in situ, sur les zones de conflit (et non à distance, comme les Américains), ce qui relativisait — selon eux — l’idée d’une « guerre sans risques », à l’origine de nombreuses critiques.

Et surtout que les règles d’engagement de ces engins passeraient par les mêmes conditions que pour les autres armes : consentement du pays, légitimation par le Conseil de sécurité des Nations unies, légitime défense, discrimination entre combattants et civils, proportionnalité de la force, utilisation dans le cadre d’un conflit (et non pas « à froid ») etc. — toutes règles qui interdisent clairement les « exécutions extrajudiciaires », condamnées officiellement par la plupart des États, dont la France.

Rappelons que, le 29 mai dernier, une équipe de journalistes du Wall Street Journal

affirmait que des éléments des forces spéciales françaises déployées actuellement près de Mossoul, auraient établi ces dernières semaines une liste d’une vingtaine de djihadistes de nationalité française, et demandé aux forces irakiennes de les « neutraliser » à leur place, pour éviter de tomber eux-mêmes sous le coup de cette condamnation.

Petits arrangements

Cité par Ouest-France, Vincent Nouzille, auteur du livre « Les tueurs de la République » (Fayard, 2015), juge cette information tout à fait crédible, en dépit des démentis officiels, et rappelle que les régimes français éliminent depuis des années des terroristes qui menacent la France, ses ressortissants et ses intérêts. Selon lui, Nicolas Sarkozy « avait décidé d’employer des moyens militaires plus offensifs et plus visibles, notamment les forces spéciales, pour mener des raids lors de prises d’otages et traquer des cibles de haute valeur pour les éliminer. Suivant comme Nicolas Sarkozy les méthodes américaines, François Hollande s’est transformé en chef de guerre clandestine en 2013 au Sahel, donnant des consignes « d’éradication » et des ordres d’exécutions visant plusieurs dizaines de chefs terroristes ».

Aujourd’hui, en Irak-Syrie, le partage de listes d’objectifs entre Américains et Français se pratique couramment : « La répartition se fait au sein de l’état-major au Qatar, en fonction des moyens militaires disponibles », précisait Vincent Nouzille le 20 mai dernier, lors des Rencontres de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), dans l’enceinte de l’École militaire.

« Ces petits arrangements (échanges de renseignements sur les cibles et sous-traitance des frappes) entre amis de la coalition anti-Daech permettent donc de contourner les lois nationales et le droit international humanitaire », écrit Ouest-France. « Et, surtout, de mettre hors d’état de nuire des djihadistes occidentaux à la motivation et aux compétences des plus inquiétantes ».

Prévenir certaines critiques infondées

Mais les auteurs du rapport sénatorial sur les drones mettent surtout en avant une série de « mesures de transparence » qu’il conviendrait de prendre pour « prévenir certaines critiques infondées » et « garantir ainsi tant le soutien de la population du pays utilisateur [de drones armés] que l’efficacité militaire à long terme de cette technologie ».

Dans la pratique, il s’agirait de « trouver un équilibre entre la transparence indispensable (pour ne pas engendrer de la suspicion et des réactions disproportionnées) et le secret (permettant de préserver les intérêts nationaux) ». À charge, pour le ministère de la défense ou l’état-major des armées de :

communiquer pour expliquer que les éventuelles frappes de drones des armées françaises ont bien lieu en accord avec les règles de droit international applicables, et sont soumis aux mêmes règles d’engagements que les autres moyens employés ;

éventuellement, communiquer ex-ante sur les normes de ciblage ou ex-post sur les frappes menées au cours de conflits ;

« en cas d’éventuel dommage collatéral d’ampleur » causé par un drone armé, rendre publics les résultats des investigations menées, « sauf considérations opérationnelles » ;

discuter avec les partenaires de la France sur d’éventuelles lignes directrices communes pour l’usage des drones ;

enfin publier des données sur « l’impact et l’efficacité des attaques éventuelles de drones en termes de combattants ennemis neutralisés, d’éventuels dommages collatéraux, et d’effets à long terme dans les pays concernés ».

Évidemment, aujourd’hui, on est assez loin du compte. Les auteurs du rapport sénatorial conviennent d’ailleurs que la question de l’armement des drones français pourrait faire l’objet… d’un débat au Parlement — ce qui serait bien le moins. Et qu’en outre, « il sera probablement nécessaire d’obtenir l’accord de l’administration et du Congrès américains » pour adapter les Reaper français (4).

Good Kill ?

Au cours des débats en commission qui ont suivi la présentation de son rapport, le sénateur Cédric Perrin a évoqué le risque de confusion entre une arme et la manière de s’en servir : « On sait que l’emploi des drones armés au Pakistan, au Yémen ou encore en Somalie a soulevé des questions de légalité internationale. C’est ce que j’appelle le syndrome Good Kill, du nom du film que vous avez peut-être vu. Ce qui a fait débat sous l’administration Obama, c’est l’utilisation de drones en dehors du cadre d’opérations militaires et de conflits armés, sans que le pays concerné ait forcément donné son accord explicite, pour des opérations clandestines de recueil de renseignement et des frappes ciblées ».

Les États-Unis se sont appuyés de manière très extensive sur la notion de légitime défense. Le statut des opérateurs de drones a également fait l’objet de débats. À la suite de ces débats, le président Obama a finalement dû annoncer en avril 2016 quelques mesures de transparence, telles que la publication du nombre de frappes de drones et de victimes, ainsi que celle du cadre juridique des interventions. Quelques mesures ont également été prises par le gouvernement britannique.

Les sénateurs concluent que les drones sont aujourd’hui au cœur de tous les dispositifs opérationnels de la France dans la lutte contre les groupes armés terroristes sur l’ensemble de la bande sahélo-saharienne, et qu’ils ont « vocation à occuper une place centrale dans toutes les opérations extérieures menées en territoire permissif, étant particulièrement adaptés contre un ennemi non étatique, fugace, qui nécessite une maîtrise aussi complète que possible de la dimension renseignement. »

Armer les drones pour rendre les forces françaises plus réactives et plus efficaces constituerait, selon eux, une étape logique supplémentaire, afin de tirer pleinement parti de leur potentiel. Les sénateurs plaident pour une « montée en puissance » des drones au sein des forces armées françaises, qui requiert aussi une véritable valorisation de la filière « drones » au niveau industriel ; et au niveau politique, une impulsion forte en faveur des filières européenne de drones, qui sont un sujet majeur pour l’Europe de la défense.

Contre-feu

Lire aussi Édouard Pflimlin, « Les Nations unies contre Terminator », Le Monde diplomatique, mars 2017.Les auteurs du rapport sénatorial ont allumé un dernier contre-feu : ils craignent qu’on confonde les drones armés — gentils, respectueux des lois et règlements, etc. — et les robots ou « systèmes d’armes létaux autonomes », dits « SALA », qui seront la prochaine génération : « Un drone armé n’est pas habité, explique Cédric Perrin, mais il est bel et bien piloté par un humain, qui déclenche manuellement le tir. Parler ici de “déshumanisation” de la guerre n’est donc pas justifié. Quand ils existeront, les systèmes véritablement autonomes poseront certes des problèmes juridiques et éthiques plus complexes, mais nous n’en sommes pas encore là ».

À l’Observatoire des armements, on craint cependant de ne pas en être loin : au rythme des développements technologiques en cours, les « robots automatisés à tuer » pourraient « devenir la norme sur le champ de bataille urbain » à l’horizon 2030, affirme Tony Fortin, dans Damoclès. Ces robots seront « multi-missions », pouvant prendre à la fois en charge le renseignement, le suivi des cibles et le tir sur l’ennemi de façon autonome. Et, dans cette guerre robotisée, le Future Combat Air System (FCAS) franco-britannique pourrait remplacer l’actuel Rafale (5).

Damoclès explique que, déjà, les « mises en réseau » entre les différents véhicules, la base et le satellite — à travers la numérisation du champ de bataille — permettent de produire en temps réel une représentation de l’ennemi : la guerre centrée sur le partage de l’information « aboutit à la désignation des ennemis dans un temps très court ; en cela, elle facilite le recours aux assassinats ciblés… ».

Mais le futur sera plus dangereux encore : « En travaillant à l’avènement de ce robot autonome, la France concourt à faire du monde un champ de bataille où plus personne ne sera en mesure de se sentir en sécurité. Ni les frontières, ni les Conventions de Genève, ni un soulèvement citoyen ne seront en mesure d’arrêter la banalisation de l’assassinat qu’une prolifération de ces robots tueurs provoquera, à la fois dans le cadre civil et militaire, et [d’empêcher] “l’Hiroshima technologique” qu’impliquera leur dérèglement possible »« Un monde peuplé de Terminator, est-ce le futur que nous voulons ? »

« Africa My Name’s Job » : quand l’art fait de l’économie

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« Sueur et co. »
© Tchif, 2017

L’artiste Tchif, Béninois quadragénaire, est emblématique d’une génération qui se moque éperdument de savoir comment les anciennes métropoles coloniales voient l’Afrique, mais se préoccupe de dire comment elle-même se perçoit et s’envisage dans le monde.

Rue de Seine, à la galerie parisienne Vallois, il a exposé en mai son nouveau travail photographique : Africa My Name’s Job (jeu de mot sur « Afrique, mon nom est Travail » et « Mon nom est Job »). Cette série d’autoportraits mélange noir et blanc et couleurs, lui permettant de rester dans ses compositions habituelles de peintre. Il incarne dans les rues de sa ville, la capitale économique du Bénin, toute la panoplie de petits métiers du secteur informel qui permettent aux gens ordinaires de survivre. Vendeur de kpayo (essence frelatée en provenance du Nigeria voisin), de tomates, de tabac, zemidijan (taxi-moto), mécanicien en bleu de travail…

Tchif ne veut pas simplement rendre hommage à la résilience de ses contemporains et à une vie sans autre perspective d’avenir que le prochain billet de 10 000 francs CFA. « En fait, dit-il, cette situation n’est pas ce que je souhaite pour l’Afrique, où la vie devrait être plus confortable parce que le continent regorge de richesses. Les matières premières viennent de nos pays, mais nous ne produisons rien. Le café nous revient sous forme de Nescafé et le coton sous forme de serviettes fabriquées ailleurs. L’Afrique ne peut pas continuer comme ça. Elle doit s’organiser autrement et créer ses industries ».

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« Tomate »
© Tchif, 2017

Cette série sera exposée à Cotonou en juin, avant qu’il ne termine ce travail au Bénin puis s’attaque aux variantes du même thème dans d’autres capitales africaines. Des marchandes d’arachides à Dakar aux vendeurs de lunettes de soleil contrefaites à Abidjan, de sachets d’eau à Kinshasa ou de plumeaux en plumes d’autruche à Johannesburg, il veut partir à la découverte de populations pour lesquelles chaque centime compte. Son objectif : participer à une prise de conscience, sans céder au misérabilisme.

Repenser le rôle du secteur informel

Lire aussi Sabine Cessou, « Le poids du secteur informel en Afrique », Le Monde diplomatique, octobre 2015.Son propos est en phase avec ceux, plus académiques, que tient Felwine Sarr, économiste et écrivain sénégalais, selon lequel le secteur informel doit cesser d’être vu sous un angle négatif : « Au lieu d’examiner cette économie pour ce qu’elle est, on ne cesse de la prendre pour ce qu’elle aurait dû être »

Il fait la jonction, comme d’autres, entre les nouveaux termes d’un débat tel qu’il est posé par certains artistes, et les réflexions en cours dans les milieux académiques — portées notamment par Ecrire l’Afrique-monde, premiers actes des Ateliers de la pensée organisés en octobre dernier à Dakar par Achille Mbembe et Felwine Sarr, et qui viennent d’être publiés chez Jimsaan et Philippe Rey.

Ancien caricaturiste de presse, Tchif s’est d’abord fait connaître par la puissance poétique de ses toiles, exposées du Brésil et au Nigeria en passant par Dubaï et les États-Unis, sans oublier Paris Art Fair cette année. « Des paysages vus du ciel, des planètes, de nouveaux territoires »… Voilà comment il décrit son travail, un sourire en coin. Soucieux d’aller toujours plus loin, il voit plus grand qu’un marché de l’art contemporain « où l’on croit que les artistes africains sont des analphabètes », dit-il. Regrettant l’absence de toute école des Beaux-Arts au Bénin, il a lancé en 2007 au centre de Cotonou un Espace qui porte son nom. Une entreprise culturelle qu’il conçoit comme une scène indépendante, alternative au Centre culturel français (CCF), un lieu d’apprentissage et d’échanges.